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Quand ils eurent dépassé le pont

Les courts-métrages sont souvent (au moins 4 d’entre-eux) construits sur le modèle voix-off + images fourre-tout. Même les courts-métrages des réalisateurs pourtant assez reconnus Kalev et Loznitsa, peinent à apporter une véritable interrogation. Le premier parce qu’à travers sa reconstitution de l’assassinat de François-Ferdinand, le réalisateur bien qu’attaché à un présent absolu adopte un point de vue en avance sur l’Histoire et la petite histoire du personnage sans arriver à mettre les deux en perspective. Le deuxième, quant à lui, déçoit par le statisme intellectuelle dont il fait preuve dans le développement d’une idée pourtant assez séduisante (surimprimer des photos de soldats fixant l’objectif sur des vues contemporaines des rues de Sarajevo).
Les courts-métrages les moins pénibles sont finalement les plus classiques dans leur forme. Ceux-ci, réalisés respectivement par Vincenzo Marra et Ursula Meier, constituent des drames où est mesurée l’influence du passé (la perte des proches, la honte des exilés) mais qui, sans être dénués d’émotion, manquent cruellement d’imaginaire.
L’intérêt principal de cette anthologie en hommage à Sarajevo réside donc surtout dans le court-métrage de Godard qui survient à mi-parcours comme la foudre dans un ciel maussade. Le montage électrique charrie des images présentes dans Je vous salue Sarajevo tout en poursuivant les réflexions présentes dans cette dernière oeuvre. Godard aborde la guerre de Bosnie-Herzégovine de manière oblique en interrogeant la manière dont celle-ci a été médiatisée et le rôle du reporter de guerre. Le Pont des Soupirs, à l’instar des Trois Désastres sorti plus tôt dans l’année, forme une extension des Histoire(s) du cinéma où Godard pose des questions qu’on pourrait accuser de démagogues s'il n’exprimait pas ainsi son regret de la capacité de plus en plus réduite des images à changer le monde.

 

25 juillet 2014

Pierre Philippe

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